Bird with broken wings are crying | Lissa "лиса" Pavlov

Present day -

Le bruit régulier des pas résonnent sur le bitume, calque les leurs avec bien trop de précision pour que ce soit annodin, le jeune homme tient toujours le bras de son frère, rit à ce qu'il lui dit, comme si il n'avait pas fait attention à la menace qui s'approchait doucement. Les rues sont plutôt calmes à cette heure tardive, du moins là où ils se rendent, ça leur donnera un avantage pour fuir si les choses venaient à se gâter. Le visage du cadet se tourne discrètement pour regarder derrière lui avant de lancer un regard à son frère.

" Sledovat ' za mnoy " -suis-moi-

Il tire sur son bras, les fait changer de direction pour emprunter une ruelle un peu plus tranquille. Ils sont suivit, c'est maintenant une certitude, mais hors de question de les conduire dans leur nouveau foyer, de mettre leur nouvelle famille en danger. Allen a compris, ça fait des mois qu'ils jouent à ce petit jeu, qu'ils se cachent, fuient, et jusqu'à présent ils s'en sont plutôt bien tirés.

Lissa fait volte-face calmement, observe les deux personnes face à eux, son visage est toujours à moitié dissimulé dans l'ombre de sa large capuche, il a pris l'habitude de porter une cape assez longue pour dissimuler tout ce qui pourrait apparaître et ne pas être humain, tout ce qui, au fond, pourrait attirer l'attention sur eux et les mettre en danger. C'était l'idée d'Allen, pas la sienne, mais elle s'était avérée utile et il appréciait porter le vêtement.

Avant même que la femme et l'homme n'ouvrent la bouche, le métamorphe laissa tomber sa capuche sur ses épaules, un voile passa sur ses yeux dont la teinte changea pour un doré un peu sombre et sa pupille s'allongea en une fente verticale. La peau de ses paumettes et de ses tempes  se mit à craquerler, dévoilant une rangée d'écailles traçant un chemin sur sa mâchoire et les côtés de son cou avant de disparaître sous l'épaisse cape noire et il entrouvrit les lèvres pour laisser apparaître deux crochets ainsi qu'une fine langue sifflante séparée à son extrémité.

" Vous n'avez rien à craindre de nous... Vous comprenez l'anglais  ? "

La femme s'était avancée, les mains levées en signe de paix mais le métamorphe n'avait pas changé de position, avançant lui aussi d'un pas avant d'être retenu par son aîné.

" Lissa. "

Le plus jeune fronça les sourcils, échangeant un regard avec Allen avant de lancer un nouveau regard en direction des deux inconnus.

" On doit partir. "

Rares étaient ceux qui parlaient ou comprenaient leur langue natale ce qui avait été plutôt avantageux depuis leur arrivée dans ce pays.

" Écoutons d'abord ce qu'ils ont à nous dire "

Débattre avec son frère ne servirait plus à grand chose à présent alors Lissa reprit place à ses côtés, sans essayer de dissimuler son apparence reptilienne, les bras croisés sur son torse, le regard fixe, jugeant, attendant la suite des évènements.
Son frère s'avança, lui adressa un discret sourire de remerciements avant de s'adresser aux inconnus.

" Nous comprenons l'anglais... Parlez doucement. "

Bien que le plus jeune ne baissa pas sa garde, il écouta silencieusement. Ces gens parlaient d'un endroit pour les êtres différents, spéciaux, comme eux, un endroit où ils ne seraient pas jugés, où ils seraient libres, où ils seraient en sécurité, où ils n'auraient plus à se cacher et ça paraissait peut-être trop beau pour être vrai. La méfiance de Lissa était probablement visible sur son visage mais elle était légitime, ils venaient de quitter ce qu'ils avaient toujours connu, leur pays, leur famille et commençaient enfin à s'habituer à leur nouvelle vie et pour le moment, cette vie lui convenait et il était hors de question de la troquer contre une nouvelle prison dorée.

C'est dans sa langue natale que Lissa reprit la parole, s'adressant uniquement à son frère et il pouvait voir à son regard que celui-ci avait déjà pris sa décision.

" pourquoi on leur ferait confiance "

" On ne peut pas fuir et se cacher éternellement Daragaya "

Le plus jeune avait plissé le nez face au surnom que lui avait donné son frère et le petit sourire de ce dernier lui indiquait qu'il l'avait totalement fait exprès mais il le laissa continuer sans rien ajouter.

" On est venu ici pour vivre comme tout le monde, alors pourquoi ne pas leur donner une chance  ? "

La décision était prise, Lissa le savait très bien, son aîné lui avait fait confiance, l'avait suivit à l'autre bout du monde, c'était désormais à lui de l'écouter, de le suivre, peut importe ce qui arriverait, tant qu'ils seront ensemble, tout ira bien.

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Peut-être qu'il avait passé sa vie à se mentir, à simplement prendre les événements comme ils venaient en se disant tout simplement qu'il n'y avait pas mieux pour lui, peut-être que tout son bonheur n'était qu'illusoire et peut-être qu'au fond il s'en doutait parce qu'il pouvait le lire dans les yeux de son frère.

On lui avait répété toute sa vie qu'il deviendrait un être exceptionnel, qu'il goûterait lui aussi à cette différence qui les rendaient tous si particuliers et magnifiques alors quand ce jour est arrivé ce fut probablement l'un des plus beau de sa vie.

Deux enfants partis de rien, deux destins identiques, une famille brisée, incapable d'élever leur descendance, ils avaient commencé leur vie comme une simple monnaie d'échange, c'était malheureusement une dure réalité dans un pays où les différences entre richesse et pauvreté était si importantes, mais eux vallaient bien plus que de simples enfants, eux pouvaient être différents grâce aux gènes de leur parents.

Le Balchoï Tsirk avait payé une belle sommes pour les obtenirs et, même si ils ne pourraient avoir la certitude de la présence de ce fameux gênes qu'à leur adolescence, ils n'avaient pas hésité.

C'est entouré des siens qu'à grandi Lissa, un cirque de mutant, un cirque exhibant des phénomènes de foire, des personnes aux capacités et particularités hors du commun.

Enfant il ne s'était jamais demandé si une vie meilleure les attendaient quelque part, loin du cirque, loin de leur famille, loin de leur pays, cette vie lui convenait, son frère était la constante dont il avait besoin, les mutants la famille qu'il n'aurait jamais eu, on l'aimait ou au moins on le traitait comme un petit trésor, une fleur qui n'attendait que d'éclore qu'aurait-il voulu de plus  ?

Son frère et lui avaient commencé à se rendre utile dès leur plus jeune âge, que ce soit dans l'entretien du cirque ou en aidant les artistes, tout le monde devait participer, tout le monde devait travailler c'est ainsi que fonctionnait leur petit monde.

En grandissant Lissa s'intéressa à l'art de la gymnastique et rapidement il fut pris sous l'aile d'une des acrobates. Le mettre dans le spectacle alors qu'il n'avait développé aucune mutation n'avait aucun réel intérêt, mais malgré ça il continuait de pratiquer, s'entrainait dès qu'il le pouvait.

Ce fut l'un des premiers éléments déclencheur de son envie d'ailleurs. Au fil du temps, Lissa avait appris à connaître la jeune femme, à sympathiser avec elle et son drôle d'accent, elle fini par lui parler de son pays, celui où elle était née, un pays loin de la Russie, le pays du rêve et de la liberté. Si l'adolescent avait commencé à douter de son propre bonheur l'adolescent c'était inconscient, relayé bien loin dans son esprit mais cette petite idée était désormais plantée dans son esprit et n'attendait qu'un petit coup de pouce pour germer et grandir.

Cette idée resta pourtant dissimulée, balayée par un événement bien plus important. C'était un jour de pluie, Allen et lui étaient chargés de s'occuper de la ménagerie, s'assurer que les animaux étaient en sécurité et qu'aucune cage ou enclo ne risquait d'être endommagé en cas de tempête. Malgré le chapiteau, la pluie parvenait à s'infiltrer, balayée par le vent, et si Lissa commençait à perdre patience et à grogner dans ses dents, son aîné accomplissait sa tâche sans rechigner. Le plus jeune avait fini par s'asseoir sur la paille, serrant quelques cordes sans réellement y prêter attention ce qui attira son attention en revanche fut les nénuphars qui se mirent à s'ouvrir dans les cheveux de son frère, de larges feuilles vertes surmontées de quelques fleurs roses et blanches. Lissa avait été incapable de prononcer quoi que ce soit et s'était contenté d'ouvrir la bouche et d'écarquiller les yeux avant de se lever pour aller toucher ces plantes qui n'avaient rien à faire là. Il n'avait pas fallu longtemps pour que le plus jeune ne réalise ce qui était en train d'arriver et un grand sourire vint illuminer son visage tandis qu'il trainait son frère avec lui afin de partager la nouvelle. Ce jour là, Allen entra officiellement dans la famille, ce jour là, il était à sa place, parmi les siens et pourrait bientôt être sous les projecteurs.

Il fallut encore un peu plus d'un an avant que Lissa suive l'exemple de son frère, une année à se demander pourquoi son don ne se réveillait pas, à se demander si réellement il viendrait un jour. L'idée d'être différent, d'être simplement normal, le terrifiait. Que se passerait-il si il ne développait jamais ce gène, si il était contraint de quitter le cirque, de quitter sa famille, son frère. Il  était si concentré sur ces hypothèses qu'il en avait presque oublié de s'intéresser à ce que voulait son frère, lui en tout cas, voulait avoir sa place dans ce cirque, lui souhaitait réellement être comme les autres, ceux qu'ils avait toujours connu.

L'acrobate, l'Américaine, était un de ses plus grand soutient, sa confidente en quelques sorte et Lissa avait fini par lui demander de leur apprendre à parler sa langue à son frère et lui. C'était important, il le savait, l'une des langues les plus parlée dans le monde et c'était toujours ça de pris à défaut d'avoir été scolarisé.

Les mois avaient passés et avec eux la gloire et les paillettes commencèrent à se dissiper. C'est après l'une des représentation du cirque que Lissa avait découvert l'envers du décor. Il avait attendu dans les coulisses, patiemment, que son frère et les autres membres de la troupe ne termine leur numéros et lorsqu'ils étaient sorti pour profiter de la fin de la nuit avant de regagner leur caravane, on les avaient interpellé.

Il n'était pas rare que des enfants ou des curieux viennent voir les artistes après un numéro et parfois Lissa avait l'autorisation de leur faire visiter la ménagerie. Mais cette fois ce ne fut pas par des sourires et des yeux émerveillés qu'ils furent accueillis, cette fois ce fut des rires moqueurs, des projectiles lancés et des insultes. Allen aurait probablement voulu qu'il n'y prête pas attention, qu'ils retournent tranquillement dans leur caravanes et oublient ce petit "incident" mais c'était hors de question, la colère l'avait emporté et si Lissa avait d'abord répondu avec des mots, les poings n'avaient pas tarder à suivre. C'est ce sentiment d'injustice, cet instinct de défense et de protection envers son frère qui furent les éléments déclencheurs, en une fraction de seconde sa respiration était devenu lourde, haletante, les os de sa mâchoire s'étaient mis à craquer et lorsqu'il avait entrouvert les lèvres pour pousser un grogement rauque, des crocs avaient remplacés ses dents. Il avait ensuite relevé les yeux vers le groupe de jeunes, ses iris avait pris une teinte ambrée et ses pupilles s'étaient dilatées, il n'avait fallu que quelques secondes de plus pour que ses oreilles ne s'étirent en pointes et soient couvertes d'une fourrure grisâtre et blanche et avant même qu'il ne comprenne ce qui lui arrivait, le groupe avait pris la fuite. Lissa avait lancé un regard à son frère qui une fois la surprise passée, le prit dans ses bras avant d'être repoussé par le plus jeune qui grogna d'inconfort avant de comprendre que c'était à cause de la queue qui avait poussée dans le bas de son dos et était désormais prisonnière de son pantalon. Un rire commun conclus cette soirée après qu' Allen fit de son mieux pour faire un trou à l'arriere du pantalon de son frère et quand les deux furent enfin calmes ils allèrent partager la nouvelle, Lissa était désormais l'un des leurs.

Les deux frères trouvèrent bien vite une place dans le spectacle après ça, un duo, les frères métamorphes, les esprits de la nature comme on les appelaient et contrairement à son aîné, Lissa apprécia rapidement cette nouvelle vie sous les projecteurs. Cette nouvelle vie dura quelques années, des années de spectacles à jouer les bêtes de foire, les monstres qu'on exhibe, des annees à apprendre secrètement une langue qui n'était pas là leur et à laisser l'idée de partir, d'aller découvrir une autre vie loin d'ici, fleurir dans son esprit jusqu'à presque devenir une obsession.

Il n'y avait eu aucun élément déclencheur cette fois, pas de grand drame ni de révolution ou quoi que ce soit. La Russie n'était pas le pays les plus développé du monde ni même le plus tolérant ou le plus riche mais c'était leur pays et Lissa avait simplement envie d'ailleurs, comme si cette vie ne lui suffisait plus et peut-être qu'au fond il avait conscience que le cirque ne leur apporterait plus rien, ils avaient brillés, eu leur heure de gloire et à présent c'était devenu une routine bien huilée et un jour viendrait où ils seraient trop vieux ou simplement trop fatigués pour continuer.

Si l'idée de partir avait vu le jour dans l'esprit du plus jeune il y a quelques années de ça, il n'en avait jamais parlé à son frère et lorsqu'il lui avoua cette pensée folle, Allen fut réticent. Il pouvait le comprendre, Allen avait toujours préféré la tranquillité, ils n'avaient peut être pas la meilleure ou la plus simple des vies mais ils étaient ensemble, il avait un toit, un travail, une famille et des amis et c'était suffisant pour le plus vieux. Les deux frères avaient passé des nuits à discuter de cette idée folle, des nuits entières à imaginer ce que pourrait être leur vie, ailleurs, une vie loin du cirque, une vie presque comme toutes les autres et surtout une vie dans un pays dont ne cessait de leur répéter "pays du rêve et de la liberté"

Je te demande de me faire confiance c'était la phrase qui changea tout, celle qui annonça leur départ parce qu'Allen était prêt à tout pour son frère, comme son frère serait prêt à tout pour lui, et parce qu'au fond, ils n'avaient besoin que d'être tous les deux. Quitter le cirque fut plus difficile qu'il ne l'aurait cru, ils avaient fui, comme des voleurs en plein milieu de la nuit, profitant tout de même de leur dernier spectacle, de leur dernière soirée, et ils avaient dit adieu à l'américaine, celle qui avait été tout pour Lissa.

Rejoindre l'Amérique leur pris des mois, des mois de clandestinité, des mois à fréquenter des centres pour jeunes, des squats, des mois à voler et à survivre, lorsqu'ils se déplaçaient sur de longues distances, Lissa prenait sa forme animale, celle qu'il avait apprit à maîtriser au moins assez longtemps pour s'en servir correctement lorsqu'il était pleinement reposé. Allen grimpait sur son dos la plupart du temps lorsque le plus jeune avait assez de force pour le soutenir. Leur dons leur fournissait les camouflages parfaits tant qu'il parvenait à rester dans la nature, pour le reste ils avaient tout essayé, trains de marchandises, camions, bateaux, tout ce qui pouvaient leur permettre de traverser les frontières pour rejoindre le pays dont il rêvait.

Lorsqu'ils avaient foulé le sol américain pour la première fois, Lissa avait fondu en larmes, à la fois épuisé et heureux mais bien vite la dure réalité leur revint en pleine face, les mutants étaient des parias, ils n'avaient pas d'argent, pas de papiers, pas d'endroit où aller et leur accent lorsqu'ils parlaient n'aidait en rien à se fondre dans la foule.

C'est lorsqu'Allen utilisa son don pour les sortir d'une situation périlleuse qu'un jeune homme les remarqua. Si les deux frères avaient presque attaquer immédiatement, ils avaient retrouvé leur calme lorsque cet inconnu leur montra son don et leur fit comprendre qu'il était comme eux. Les russes trouvèrent une nouvelle famille ce jour là, un petit groupe de mutants clandestin vivant cachés, survivant grâce à leurs pouvoirs et ne reculant devant rien pour leur survie.

Lissa trouva une nouvelle forme de bonheur dans cette vie, ce n'était certes pas celle dont il avait rêvé mais il était heureux, il se sentait libre avec cette nouvelle famille, libre d'être qui il était et de faire ce dont il avait envie sans dépendre de personne. Allen ne s'était jamais plaint, n'avait jamais remis son choix en question alors ils avaient continué ainsi quelques mois jusqu'à ce fameux jour, ce jour où ils avaient été suivit, ce jour où on leur offrit la possibilité d'un avenir meilleur. Lissa avait refusé, leur nouvelle famille avait refusé, mais Allen semblait penser que c'était ce qu'il y avait de mieux pour eux alors pour une fois, ce fut à Lissa de lui faire confiance.