Niveau de pouvoir : 4 Niveau de maîtrise : 1 Messages : 466 Date d'inscription : 27/01/2019 Humeur : Fatigué
Sujet: Special. | ft. Meryl Sam 9 Mar - 23:41
Roulement des trains, brouhaha des passants. Ça s'agite à la Salem Center Station, sous les coups de 8h, et entre le pas des travailleurs et le chuchotement des rails de métro, on entend murmurer les écouteurs où bat déjà une musique trop puissante. Caleb s'assoit sur un banc et observe. Ses yeux se baladent d'une silhouette à l'autre, détaillent les vêtements des passants, glissent le long de leurs expressions. Il se demande, il s'imagine les vies de chacun, certaines tragiques, d'autres romantiques, les voit en héros de roman et se questionne sur leurs tourments. Imagine Dragons donne à la scène une allure cinématographique qu'il apprécie, conférant aux voyageurs qui s'affairent un rythme d'arrière plan. Tout semble calculé, précis, esthétisé peut-être. Un sourire courbe ses lèvres. La vie, en cet instant, est satisfaisante.
Un vent de liberté souffle sur cette journée où bourgeonne l'automne, et tandis que le temps se fait plus clément l'école elle-aussi a décidé de leur accorder un peu de plaisir. Le garçon trépigne. Cela fait longtemps déjà qu'il veut sortir, se perdre dans le Dehors et profiter enfin de la mégalopole qui trône à quelques kilomètres de l'Institut. Aujourd'hui est plus spécial encore. Plus spécial, parce qu'il le fait, parce qu'il ose, parce qu'enfin il s'évade, et puis parce qu'il ne le fait pas avec n'importe qui. Meryl est quelqu'un de... quelqu'un de spécial. Le mot l'amuse, lui tire un sourire, sa répétition l'enchanterait presque mais il la fait taire, préférant à ses émules le calme plus doux de son contentement. Meryl, c'est une fille – non, se corrige-t-il, une femme – à laquelle il n'aurait jamais cru s'attacher, auprès de laquelle il n'aurait jamais pu se lier, autrement que dans cette école si singulière où il a atterri, et c'est là peut-être l'un des rares avantages de ce lieu synonyme de perdition. Meryl. Décalée, déconstruite et pourtant brillante, presque inspirante. Forte. Caleb a conscience de ne pas posséder le quart de ses qualités, ces traits qu'il admire tant chez elle et qu'il voudrait développer, un jour, quand le temps sera venu et que la voie aura été montrée. Il l'apprécie. Sa présence l'apaise, étonnament, le soigne d'une manière qu'il ne saurait expliquer, l'élève dans la tendresse d'un regard. Le garçon ne comprend pas tout des combats qu'elle mène, mais il tente, il essaie.
Son regard se détourne, cherche dans les vagues de marchants la silhouette ramassée de la jeune femme. Lorsque finalement il l'apperçoit, il s'illumine. Le sourire mord les joues, allume le regard, électrise les muscles qui aussitôt s'activent. Caleb se redresse, s'avance vers elle. Il se veut rassurant, apaisant peut-être. Si la perspective de conquérir la Grosse Pomme l'enchante, il sait que ce n'est pas forcément le cas de son amie – ils sont amis, n'est-ce pas ?
« Salut... »
Spontanément, il voudrait offrir une accolade, se retient toutefois de lui imposer un contact que lui-même a appris à craindre. Ce ne serait pas juste. Il n'a pas envie de lui faire peur. Pas maintenant. Aujourd'hui est une occasion qu'il refuse de manquer, un coche qu'il ne veut pas louper. Alors il sourit, offre à sa compagne son faciès le plus aimable, le plus doux, lui tend doucement des doigts gantés afin de la rassurer. Il ne sait pas comment s'y prendre, craint de ruiner ses chances.
« Tu vas bien ? »
La perspective de New York. L'horizon découpée, géométrique, et l'océan qui s'étend, les ponts et l'atmosphère, l'ambiance, l'âme. L'idée l'enchante, l'idée le porte, insuffle en lui l'enthousiasme d'une armée. Aujourd'hui, Meryl va s'éclater. C'est ainsi qu'il en a décidé.
Son regard pétillant croise celui de la jeune femme. Il enlève son AirPod, le glisse dans sa boîte en un chuintement qui se veut discret, relève la tête.
« On a un métro dans quelques minutes. Tu viens ? »
Leurs pas résonnent dans la montée d'escaliers, mélodie asymétrique, symphonie de leurs différences alliées entre elles. Ils descendent, s'enfoncent juste à temps pour distinguer le véhicule dans lequel ils grimpent.
Un peu de temps, un siège inconfortable, et le bruit constant des roues contre les rails. Caleb tend une boîte d'AirPods à son amie – un cadeau de son père, un de plus, une paire de rechange a-t-il dit, au cas où il les perde de nouveau derrière une machine à laver – et les connecte à son téléphone sans oser songer à leur provenance. C'est que parfois, il se demande si ses parents ne tentent pas de l'éloigner discrètement de leur existence. Mais là n'est pas le sujet. Au contraire.
« Led Zeppelin ? »
Les accords de guitare accompagnent le trajets, oscillation entre la clarté des stations et les ténèbres des tunnels, minutes qui défilent en chanson comme en kilomètres. Le métro avale la distance, dévore le paysage. Caleb tente de contenir son impatience, pourtant ses dents s'agitent contre sa lèvre inférieure, rougie de tant de maltraitance. Son regard croise celui de Meryl. Il sourit. Il discute. Il passe le temps pour mieux se distraire.
Dehors, par delà les vitres crasses du wagon, l'obscurité cède à la lumière. New York City émerge, de part et d'autre, et l'on aperçoit au loin la silhouette géométrique de Manhattan. Ça y est. Ils arrivent bientôt. Le soleil embrasse la poussière qui colle aux fenêtres, révèle pourtant la candeur des paysages extérieurs. Les iris pétillants le reflètent, heureux d'en profiter ici. Ce lieu est spécial, intense à sa manière. Il veut en profiter. Son regard glisse vers sa compagne, la jauge en silence.
« Tu veux faire quoi, dis, là-bas ? C'est quoi, le truc qui te manque ? »
Il a besoin de savoir. Il ne veut pas se planter. Il veut qu'elle profite. Pour elle, ce jour est sans doute plus spécial encore, plus angoissant aussi. Tout doit bien se passer. C'est important. Mais à peine la question posée, celle-ci meurt à l'annonce de leur arrivée.
« 111 St. »
La voix mécanique retentit. Il se tourne vers, elle, sourit de nouveau. Son cœur chante, ses yeux pétillent, ses doigts frémissent. Il espère qu'il en va de même pour elle. Il s'agit ici de renouer avec le monde, après tout, avec la vie, avec ce Dehors qu'ils n'ont pas fréquenté depuis trop longtemps. Et si, dans son cas, il s'agit simplement de quelques semaines, il n'imagine pas la frustration de sa compagne.
« C'est parti... »
Ici, ils sont tout proches du zoo. Ici, ils sont au cœur du Queens, au final, peuvent se rendre n'importe où si la jeune femme ne désire pas arpenter les allées, sans doute bondées, du parc animalier. Caleb ne s'y connaît pas très bien, dans tout ça, mais il veut essayer, veut qu'elle se sente à l'aise, qu'elle rentre ce soir avec un sourire aux lèvres et que, entrant dans sa chambre, elle ferme les yeux sur des souvenirs candides plutôt que sur la placidité d'un monde qu'on lui a arraché.
L'air de l'extérieur lui arrache un sourire plus grand encore. New York City. Il se sent comme animé soudain, pris par l'ambiance générale de la ville, enthousiasmé par la liberté qui le grise. New York City. Comme un rêve, comme un soleil. Elle brille, elle l'emporte, et il ne peut s'empêcher d'offrir à son amie un faciès trop enthousiaste.
« Je suis content d'être ici. Vraiment content. »
Une seconde de pause.
« Avec toi. »
▲
❝ Meryl Hammond ❞
Niveau de pouvoir : Niveau 3 Niveau de maîtrise : Niveau 1 Messages : 45 Date d'inscription : 28/02/2019
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Dim 10 Mar - 12:23
Special
❝ Pv Caleb ❞
Meryl était à l'Institut depuis une année. Depuis tout ce temps-là, elle pouvait compter sur les doigts d'une main le nombre de fois où elle était sortie de l'établissement. Et jamais elle n'était allée aussi loin que là où elle s'apprêtait à aller maintenant. Dire que Meryl était nerveuse était un euphémisme. Elle était terrifiée.
Elle avait passé des heures à méditer dans sa chambre pour garder ses émotions sous contrôle, sacrifiant ses heures de sommeil. De toute manière, elle n'aurait pas pu s'endormir. Pas quand la perspective de cette sortie la hantait à ce point. Mais elle n'était pas seule. Et c'était pour cela qu'elle avait accepté de tenter l'aventure.
Non, elle était avec Caleb. Cher Caleb. Probablement l'un des seuls mutants qui pouvaient comprendre ce qu'elle avait pu traverser, la pression de tenter de se conformer sans cesse aux attentes toujours plus élevées d'un père exigeant et le rejet lorsque cela s'avérait ne pas être possible.
Quand Meryl regardait Caleb, elle ne pouvait s'empêcher de se voir à son âge, avant que tout ne bascule, avant que ses pouvoirs ne commettent l'irréparable et qu'elle soit internée, loin du reste du monde. Il avait de la chance d'avoir été accueilli par l'Institut aussi tôt. Il pourrait se construire, se reconstruire, et avoir la chance d'être jeune et de grandir à son rythme. C'était tout ce qu'elle lui souhaitait.
Encaissant tant bien que mal l'agression d'un monde extérieur empli de vie et de bruit, Meryl focalisait toute son attention sur le jouet anti-stress qui lui avait été fourni peu de temps après son arrivée à l'Institut et qui l'aidait à maîtriser sa nervosité. Elle entortillait ses doigts dans le Tangle, concentrant son attention sur l'objet de plastique, évacuant ses émotions par ce geste qui la rassurait et la détendait.
La dernière chose que Meryl voulait, c'était perdre son calme et le contrôle de ses pouvoirs. Ils ne devaient pas se faire remarquer. Pire, si elle venait à blesser Caleb par mégarde ? Ca, elle ne pouvait pas l'accepter. Cela ne devait pas arriver. Jamais. Alors, Meryl faisait ce qu'il fallait pour garder la maîtrise d'elle-même. Pour que cette journée ne soit qu'un heureux souvenir.
Enfin, Caleb était là. Meryl lui adressa un sourire maladroit, répondant à son "Salut" par un "Bonjour." doux, mais hésitant, comme si elle n'était pas certaine elle-même que cette journée serait vraiment bonne. Il tend ses doigts gantés vers elle et elle les effleure, sans s'y attarder. Caleb menait ses propres combats, des combats qu'elle ne pouvait pas comprendre.
Cela devait être douloureux de ne pas pouvoir toucher quelqu'un sans craindre de leur faire du mal... Même si elle n'était pas spécifiquement tactile, Meryl compatissait avec Caleb et avec les difficultés qu'il affrontait. Tout ce qu'elle pouvait souhaiter, c'était qu'il parvienne un jour à se contrôler suffisamment pour ne plus avoir besoin de cette barrière entre lui et les autres.
A sa question sur son état, Meryl répondit avec la franchise qui était sienne, triturant nerveusement son jouet anti-stress :
"Je suis terrifiée. Mais je vais bien. Et toi ?"
Sa présence le rassurait. Sans lui, elle n'aurait pas trouvé le courage de sortir, surtout pour s'aventurer aussi loin de l'Institut. C'était une première. Peut-être pas la dernière. Elle suivit Caleb lorsque celui-ci la conduisit vers le métro qu'ils devraient prendre, partagée entre curiosité et anxiété. Elle n'avait jamais pris le métro jusqu'alors. Oh, elle en avait vu dans les films et séries qu'elle aimait tant, mais en emprunter un elle-même ? Ca, c'était une première...
Le métro était déjà arrivé lorsqu'ils se retrouvèrent sur le quai. Ils eurent tout juste le temps de s'engrouffrer avant que celui-ci ne prenne son départ, dans un crissement qui tira une grimace à Meryl et la poussa instinctivement à se boucher les oreilles. Elle demeura ainsi quelques instants, avant de baisser prudemment les mains, recommençant à jouer avec son Tangle, espérant que le trajet ne durerait pas trop.
Meryl avait rapidement décidé qu'elle détestait le métro. Trop de bruits, trop d'odeurs et une lumière désagréable pour ses yeux sensibles. Alors qu'elle commençait à entendre le chuintement si familier du verre, Caleb lui tendit une paire d'écouteurs sans fil. Elle les accepta sans bruit, hochant la tête lorsque Caleb lui proposa d'écouter Led Zeppelin. La musique envahit ses tympans et effaça tout le reste, l'aidant à garder son calme.
Caleb lui parlait, lui souriait, mais elle avait bien du mal à organiser ses pensées pour lui répondre correctement. Tout était si... nouveau. Si envahissant. Meryl se sentait étrangère dans ce monde qui l'avait rejetée depuis sa naissance ou peu s'en faut. Se faire sa place n'allait pas être chose aisée. Caleb lui pose une dernière question, une question à laquelle il lui faudrait réfléchir pour répondre, mais leur métro s'était arrêté et il était temps pour eux de descendre.
Et enfin, ils sortent, hors de ce métro infernal, hors de ce lieu empli de bruit et d'odeur, pour un dehors que Meryl n'avait jamais vraiment expérimenté. Ses lèvres s'entrouvrent dans une expression ébahie, ses yeux s'aventurant sur tout ce qui pouvait se trouver autour d'elle. Tant de gens, tant de constructions, tant de vie... Jamais la télévision n'avait été mesure de retranscrire proprement ce que cela signifiait d'être au coeur de New York. Maintenant, Meryl le savait.
Caleb s'adressa à elle, mais Meryl pouvait à peine l'entendre, le comprendre. Elle peinait à réaliser qu'elle faisait ses premiers pas libres dans le monde extérieur, loin de l'Institut, loin de l'hôpital, loin de la maison de son enfance. Libre. Libre. Des larmes commencèrent à rouler sur ses joues et la sensation humide la ramena sur Terre. Surprise, elle essuya rapidement ses joues, s'excusant auprès de Caleb :
"Je vais bien, je vais bien..."
Un autre sourire sur ses lèvres. Plus sincère. Plus naturel. Le monde était intimidant, mais il s'étendait tant et si bien que Meryl ne pouvait en voir les limites. Elle avait l'habitude d'être entourée de murs, de ne voir l'extérieur qu'à travers une fenêtre. Pour la première fois depuis des années, Meryl respirait.
"Je... Je ne sais pas où aller, à dire vrai. Je ne suis jamais venue ici. Ou... Ou ailleurs. Je ne suis sortie de l'Institut que quelques fois et j'avais toujours le bâtiment en vue durant ces moments. Je... Je ne sais pas par où commencer."
Elle se balança sur ses pieds, adressant un doux sourire à Caleb. Talon, pointe, talon, pointe. Un geste qui l'aidait à restructurer ses pensées et à les traduire en mots. Elle avait tant à exprimer à cet instant précis... Mais il lui était bien difficile de traduire les images qui traversaient son esprit en phrases précises et construites. Alors, elle se contenta de déclarer à l'adresse de Caleb :
"Je te fais confiance. Si tu veux que nous marchions dans les rues, je le ferai avec toi. Si tu as un endroit en tête, je te suivrai. Tu connais certainement ce monde mieux que moi, alors tu devrais être notre guide. Ce serait plus avisé."
Elle ajouta, sans se départir de son sourire :
"Je suis heureuse d'être ici avec toi. Vraiment."
Et elle l'était. Même si l'anxiété était toujours là.
(c) sweet.lips
▲
❝ Caleb Turner ❞
Niveau de pouvoir : 4 Niveau de maîtrise : 1 Messages : 466 Date d'inscription : 27/01/2019 Humeur : Fatigué
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Lun 11 Mar - 20:12
Peur. Ombre terrifiante qui partout s'immisce, qui dans chaque chose s'imprègne, maîtresse de leur trajet, impératrice peut-être de la jeune femme qu'elle tourmente. Caleb aimerait voir Meryl s'en débarrasser, se couronner au contraire d'un enthousiasme qu'il sent poindre par delà le miasme noir de ses angoisses, se rendre plus belle encore par la force qu'elle est capable de déployer – qu'elle déploie déjà d'ailleurs.
Ils descendent du métro, libérés du carcan d'odeurs et de sons omniprésents, pénètrent enfin le corps de la ville. Queens. Ce n'est pas l'endroit que Caleb a le plus visité, pour autant son aspect résidentiel lui paraît moins agressif que les tumultes de Manhattan. C'est une grande étape pour son amie déjà, le temps n'en est pas encore à Times Square. Cela viendra, il l'espère, il le souhaite, simplement plus tard, quand la jeune femme se sentira prête et que ses expériences l'auront menée à croire en elle, à croire qu'elle est capable. Parce qu'elle l'est.
Le jeune homme tourne vers Meryl un sourire enthousiaste qui aussitôt se fane. Des larmes coulent sur les joues de son amie, font briller le visage poupin sous les doigts lumineux du soleil. Ses lèvres s'entrouvrent sur des mots qui refusent de sortir, le silence noue sa gorge sans qu'il ne sache quoi faire. Caleb se fige, s'avance, hésite.
« Je vais bien, je vais bien... »
Les propos de son amie l'interpellent. Il s'arrête, la regarde de nouveau, la détaille. Se détend. Un sourire ému bourgeonne sur ses traits tandis qu'il recule d'un pas, revenant à sa position originale, lui laissant le temps et l'espace nécessaire pour qu'elle se ressaisisse, pour qu'elle s'exprime. Et elle le fait. Le garçon en est presque surpris, ravi surtout. Les mots le touchent, l'attitude l'emporte, il l'écoute et son visage bourgeonne. Le bonheur semble s'être invité à leur sortie, pour son plus grand plaisir, pour leur plus profonde satisfaction.
« Je... »
Il ne sait pas quoi répondre, ne trouve pas la phrase qui saura dire ce qu'il éprouve, alors il se contente de garder sur ses traits la même expression ravie, de laisser son regard exprimer les sentiments qui gonflent sa poitrine. C'est drôle, son cœur est comme enflé, étonnamment vivant dans sa cage thoracique. L'organe autrefois pétrifié paraît se délester enfin de son carcan glacial, retrouvant la vivacité qu'il avait enterrée sous sa monotonie permanente. Cela fait trop longtemps qu'il n'a pas ressenti une telle joie sans doute, un bonheur aussi simple et aussi évident pourtant.
Mais il n'a pas le temps de s'extasier de son propre cas. S'ils sont ici, c'est avant tout pour profiter, pour dévoiler à Meryl ce monde dont elle a trop de fois été arrachée. Les yeux clairs parcourent les alentours, rues tranquillement boisées à l'animation paisible, quelques passants arpentant les allées ensoleillées. Son sourire se fait plus tranquille. Il tend doucement une main gantée, sans pression, sans empressement.
« Dans ce cas... Dans ce cas, pourquoi ne pas nous balader ? Tu n'es jamais venue dans le Queens si ? Il n'y a pas grand chose à faire à proprement parler, même s'il y a un zoo je crois – je l'ai vu sur Google mais je n'y suis pas allé – mais c'est un quartier super culturel. Enfin comme c'est résidentiel et que New York est, tu sais, une ville d'immigrés, y a plein de populations qui s'entremêlent et c'est cool, même si traîner là-bas le soir c'est pas forcément le mieux à faire selon les quartiers. Nous on reste dans la zone sympa de toute façon ! On pourra manger un burger dans un restaurant au hasard ! »
Une seconde de réflexion, puis il grimace.
« Ouais, peut-être pas au hasard, on sait jamais. »
Il ne sait pas pourquoi il parle tant. Caleb n'a jamais été quelqu'un d'incroyablement silencieux, pour autant il n'est pas du genre à s'étaler à ce point d'ordinaire. Le phénomène est d'autant plus étrange que cela fait plusieurs semaines qu'il s'évertue à se taire, ne s'exprimant que trop peu en publique et trouvant rarement des mots pour lui convenir. L'enthousiasme lié à cette sortie, mêlé d'un peu de nervosité crée sans doute le détonnant mélange qui le pousse à se livrer ainsi – une analogie qui serait appréciée par M. McMillan, il n'en doute pas.
Laissant un petit rire se répandre dans les airs, il entreprend de marcher le long de la 45ème avenue, longue et large, bordée de petits pavillons et de vieilles maisons de briques rouges encadrées des mêmes grillages qui semblent habiter toutes les villes des Etats-Unis. La sensation est bêtement grisante. Se tenir loin de l'Institut a quelque chose de rafraîchissant, une liberté dont il entend bien profiter pleinement.
« Il y a un parc, pas très loin, dans lequel se trouve le zoo. Il va jusqu'au bord de l'océan. Ça te dit ? »
Le cerveau de Caleb fourmille d'idées, douces, candides, de projets tendres pour faire de cette journée un souvenir à chérir. Il lance un regard à Meryl, surveillant son état, un instinct presque protecteur prenant le relais de sa bonne humeur.
« Tu veux réécouter de la musique ? »
▲
❝ Meryl Hammond ❞
Niveau de pouvoir : Niveau 3 Niveau de maîtrise : Niveau 1 Messages : 45 Date d'inscription : 28/02/2019
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Jeu 14 Mar - 19:25
Special
❝ Pv Caleb ❞
Meryl réalisait à peine l'étendue des choses nouvelles qu'elle s'apprêtait à accomplir, des événements à priori ordinaires qu'elle n'avait jamais eu l'opportunité d'expérimenter par elle-même, qui lui avaient été arrachés pour tenter de faire d'elle ce qu'elle n'était pas.
Lui tendant sa main gantée, Caleb parlait, parlait, et Meryl écoutait attentivement, prenant son temps pour assimiler correctement ses propos, ses intentions, le ton de sa voix. Les gens trop bavards pouvaient parfois l'épuiser, envahissant sa cervelle d'un bourdonnement aussi insupportable qu'incompréhensible, mais ce n'était pas le cas de Caleb.
Sa voix était douce et ses paroles engageantes. Il ne cherchait pas à parler pour la faire taire ou pour ramener constamment l'attention et la conversation à lui, comme bien des personnes que Meryl avait pu croiser dans l'entourage de sa famille ou même ses propres parents.
Il partageait ce qu'il aimait, l'engageait, voulait avoir son avis... Il souhaitait l'entendre, communiquer avec Meryl, selon ses termes à elle. Ce qui ne lui était jamais arrivé avant de rejoindre l'Institut, un an auparavant...
Sa main glissée dans celle gantée de son jeune ami, Meryl le suivait religieusement, s'efforçant de ne pas laisser son attention se disperser trop dans cet environnement ô combien stimulant et novateur.
Tout attirait son regard, ses sens, lui donnait envie de s'arrêter pour observer, toucher, sentir, y compris ce qu'elle imaginait être peu agréable. Ce monde lui tendait les bras et n'attendait qu'elle. La perspective l'excitait autant qu'elle l'angoissait.
Alors, elle continua à tenir la main de Caleb, d'une poigne légèrement ferme, et entreprit de répondre à son bavardage :
"Je n'ai jamais mangé de burger dans un restaurant avec qui que ce soit et je n'ai pas non plus visité de zoo, alors je serais très heureuse de faire cela avec toi pour la première fois. Mais nous pourrions effectivement commencer par le parc. Je n'ai pas souvenir d'avoir déjà vu l'océan en vrai et je parie que cela doit être bien plus beau et fascinant que toutes les images qui en existent dans les livres et les films."
Meryl avait expérimenté le monde à travers un écran, par-delà les pages des ouvrages qu'elle avait dévoré dès qu'elle l'avait pu.
Le monde au-delà de la maison familiale. Le monde au-delà des thérapies incessantes. Le monde au-delà de l'hôpital et du brouillard imposé par son traitement trop lourd. Le monde si proche et si loin à la fois.
Un écran ne pouvait pas retranscrire proprement ce que vivait actuellement Meryl. Tous ses sens étaient mobilisés, sollicités, aussi bien agressés qu'envoûtés. Un concert de bruits, de couleurs, d'odeurs, de fureur de vivre...
Elle allait probablement ressortir épuisée de cette expérience, très certainement chamboulée, mais à cet instant précis, elle n'échangerait sa place avec qui que ce soit pour rien au monde. Elle était libre. Libre et en très bonne compagnie.
Caleb lui proposa d'écouter à nouveau de la musique. Meryl hésita un instant, avant de secouer la tête :
"Pas tout de suite. Plus tard, peut-être. Ici, ce n'est pas aussi intense que le métro. Je peux le supporter. Je peux le découvrir et ne pas en souffrir. Je veux faire tout ça avec toi. Voir le monde que tu vois, entendre ce que tu entends, sentir ce que tu sens, goûter ce que tu goûtes. Je veux vivre dans ton monde, aujourd'hui."
Elle serra un peu plus fort la main de Caleb, prenant une profonde inspiration. Puis elle lui demanda, curieuse et intéressée par ce que le jeune homme pourrait lui répondre :
"Tu sortais souvent, toi ? Avant l'Institut, avant tout ça... Tu venais souvent ici ou ailleurs ?"
Meryl tritura son jouet anti-stress, songeuse, avant d'ajouter d'une voix douce :
"J'ai regardé le monde à travers une fenêtre, un écran ou les pages d'un livre pendant trop longtemps. J'aimerais en être plus que simple spectatrice. J'aimerais y participer, même si je sais que ce monde ne m'est pas forcément ouvert, pour bien des raisons..."
Sa poigne sur la main de Caleb se fit un peu plus forte, sans qu'elle ne le réalise, alors qu'elle reprenait d'un ton un peu plus vindicatif :
"S'il ne nous est pas ouvert, ce monde, il n'appartient qu'à nous d'en enfoncer les portes. Tu ne crois pas ?"
Se faire leur place dans la société, malgré les jugements, malgré la méfiance, malgré les qu'en dira-t-on... Ils le méritaient, tout autant que n'importe qui. Oui, ils le méritaient...
(c) sweet.lips
▲
❝ Caleb Turner ❞
Niveau de pouvoir : 4 Niveau de maîtrise : 1 Messages : 466 Date d'inscription : 27/01/2019 Humeur : Fatigué
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Mer 20 Mar - 22:02
Meryl est fascinante. Ses yeux et son attention virevoltent d'un détail à l'autre de la rue, son visage en éveil, ses mots sont trop élaborés pour une conversation de routine et son intonation est d'un calme presque professoral. Ce qui interpelle Caleb pourtant, au delà de toutes ces manières si spéciales – si Meryl – ce qui le choque plus que tout, ce sont les paroles qu'elle tient. Une parole précisément. Son regard s'écarquille et sa bouche s'ouvre en un « o » parfait. Il s'arrête dans ses pas, place devant lui une main qui s'agite lentement de haut en bas, signe d'arrêt, signe d'attente.
« Attends, attends... T'as jamais mangé de burger dans un restaurant ?! »
Choc. Derrière l'humour qu'il souhaite distiller dans ses mots, le garçon prend conscience de sa chance. Il a toujours su qu'il était privilégié. Il a toujours su que sa situation était enviable. Il ne l'a jamais caché, il n'en a jamais douté. C'est quelque chose qu'on lui a appris, inculqué, insufflé depuis petit. T'as de la chance, Caleb. Tu fais partie de ceux qui n'ont pas à se plaindre. Sois reconnaissant. Et il l'est. Il l'était. Peut-être est-ce d'ailleurs ce qui a rendu sa déchéance plus douloureuse encore. Pour autant, la conception d'un monde tel que celui dans lequel a été forcée d'évoluer Meryl le heurte presque violemment. Des plaisirs basiques transformés en chimères, des loisirs simples comme autant de rêves, la vie de son amie lui paraît toujours plus difficile, toujours plus révoltante.
Mais l'heure n'est pas à la contestation, songe-t-il, et il s'efforce de ravaler la colère qui remonte le long de sa gorge. Ce n'est pas facile, mais il veut préserver la bonne humeur qui s'est installée entre eux, la candeur de cette discussion, et ne pas remettre les pieds dans le passé tortueux de la jeune femme. Elle n'y est plus. Elle n'y retournera plus jamais. Ce qui compte c'est le présent, le soleil doux contre la matinée bourgeonnante du Queens et la vie qui, pour une fois, leur tend les bras. Le sourire de Caleb, qui était devenu hésitant une seconde, reprend de la vigueur.
« Bon, c'est décidé, je t'invite. Et après, ou avant, on ira tremper nos pieds dans l'océan – même si on n'a pas le droit, on trouvera bien un endroit. »
La poigne de Meryl est forte contre la sienne, un peu crispée sans doute, mais il n'en dit rien. Sans doute n'a-t-elle pas besoin qu'on lui rappelle qu'elle est nerveuse – c'est elle qui le ressent après tout. Le garçon décide donc de contribuer à la détendre, à transmettre tout son enthousiasme à celle que le destin a tant malmenée, à lui montrer que tout va bien, que tout ira bien. Si la question le prend de cours, il n'en dévoile rien.
« Sortir? Ouais, tout le temps. »
Un petit temps d'arrêt. Le sourire frémit, comme luttant contre une ombre avant de reparaître, plus franc encore. Caleb évoque la joie passée plutôt que de se souvenir qu'elle n'est plus. C'est difficile, et un instant lui aussi raffermit son emprise sur les doigts de son amie, pourtant il s'efforce de ne pas laisser son expression se ternir. Raconter. Ne pas y penser. Juste parler.
« J'allais souvent à New York avec mes parents, comme j'habitais dans le Maine ça faisait un peu loin tout seul. C'était cool, même si entre nous on se rendait plus souvent à Manhattan qu'ici. C'est plus... mouvementé, disons. Et plus branché peut-être. On ira un jour si tu le souhaites ! »
Il laisse planer un instant de flottement, jauge la réaction de Meryl avant de reprendre.
« Mais oui, je sortais souvent. Tout le temps, en fait. J'allais squatter dans le diner du coin tous les soirs après les cours pour prendre un milkshake et draguer la fille des proprios, puis parfois on en profitait pour jouer au babyfoot avec mes potes. C'était fun. »
Un petit rire lui échappe. Ça laisse un goût amer sur sa langue, ça lui fait un peu mal aux poumons, il se mord la lèvre en baissant brièvement la tête. Un souffle, une inspiration. Il ouvre la bouche sans trop savoir quoi dire.
C'est Meryl, finalement, qui rompt son élan nerveux. Elle sourit, elle parle, elle est pleine d'espoir et ses paroles s'enfoncent droit dans son cœur pour mieux l'enfler d'une émotion nouvelle. Caleb relève la tête, presque brusquement, lui lance un regard perdu entre surprise et joie, laisse un sourire nouveau bourgeonner sur ses traits. Ses doigts serrent tendrement ceux de la demoiselle.
« Merci. Tu as raison... On va faire ça bien. Et ensemble. »
Détermination renouvelée, enthousiasme rayonnant, le garçon se redresse et c'est d'un geste enthousiaste qu'il désigne l'aurée boisée du parc qui lentement se profile. Il adresse un regard pétillant à son interlocutrice.
« Voilà ! On y est. On va pouvoir petit-déjeuner... »
Un éclat malicieux s'éveille sur ses traits tandis qu'il désigne son sac, le caressant du bout de ses doigts.
« On trouvera peut-être de quoi manger un milkshake aussi... »
Ses pensées dansent et il avance, guilleret, son moral de retour à son zénith, son cœur de retour au présent. Et rien n'est parfait, tout est en ruines encore, mais il songe soudain à y croire. L'herbe verte ploie sous leurs pas joyeux, il raconte en même temps l'histoire de cette fois où, petit, il a voulu courir après un cygne dans le dos de ses parents préoccupés, montre ses phalanges en mimant la cicatrice qu'il avait gardé de l'expérience.
« Dans le Maine, on a des lacs magnifiques et la côte est sauvage. On peut faire des feux de camp sur la plage, c'est génial... Mais les animaux sont moins cools ! »
Son rire s'élève comme un chant de rébellion et lorsqu'il s'installe finalement, le soleil caressant ses tâches de rousseurs, c'est un soupir content qui caresse ses lèvres entrouvertes. Ça y est. Il est bien.
« On pourra louer des vélos aussi, et faire le tour du lac. Mais d'abord... »
Dans un geste enthousiaste, il défait la fermeture éclair de son sac afin d'en sortir la multitude de biscuits qu'il y a soigneusement rangés. Il les aligne soigneusement, face visible, sourit avec amusement et l'observe, elle, avec une tendresse dont il ignore la provenance.
« Et voilà... Ah, attends. »
Il dégaine une bouteille de plastique blanche enroulée d'un papier rouge qui revendique fièrement le titre de « Yop ! ». Il s'agit là d'une boisson qu'il a découvert récemment, perdue dans les rayons d'un supermarché paumé de sa région, pourtant il doit bien avouer qu'il y est devenu complètement addict.
« C'est français. », donne-t-il pour toute explication.
▲
❝ Meryl Hammond ❞
Niveau de pouvoir : Niveau 3 Niveau de maîtrise : Niveau 1 Messages : 45 Date d'inscription : 28/02/2019
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Ven 29 Mar - 19:51
Special
❝ Pv Caleb ❞
Meryl avait parfois du mal à réaliser à quel point tout ce qu'elle avait pu rater était commun pour la plupart des gens. Pour les personnes comme Caleb qui avaient été autorisés à avoir une vie "normale", même si les choses avaient changé depuis la découverte de sa mutation... Un burger dans un restaurant, c'était un événement banal, oubliable, le genre de choses qui se faisait sans le planifier et qui s'effaçait de la mémoire sitôt effectué. Une activité comme une autre.
Pour Meryl, c'était bien plus que cela. Elle savait qu'elle n'oublierait jamais cette journée, ce qu'ils feraient ensemble, toutes les choses qu'ils pourront voir et expérimenter. Et pourtant, si elle venait à raconter sa sortie, son récit n'aurait rien d'exceptionnel. Meryl doutait que quelqu'un comprendrait réellement ce que toutes ces activités signifiaient pour elle, ce qu'elles représentaient à ses yeux. Prendrait-on seulement la peine de l'écouter ? Tout cela était probablement si ennuyeux, pour ceux et celles qui pouvaient en profiter quotidiennement sans y penser davantage.
Face à l'exclamation de Caleb, Meryl avait eu un sourire maladroit, timide, avant de déclarer en réponse à son étonnement :
"Mon père est une figure publique. Il ne prendrait pas le risque de m'emmener dans un restaurant et encore moins pour manger quelque chose d'aussi peu... élégant, dirais-je. Et ma mère n'a jamais souhaité se montrer avec moi, si elle pouvait l'éviter. J'étais une source d'embarras. Une erreur qu'ils ne parvenaient pas à corriger, depuis mon plus jeune âge."
Elle n'oublierait jamais les heures de thérapie, les maltraitances, les injures, ces attentes impossibles placées sur elle et sans cesse reculées, la forçant à tenter d'atteindre un idéal auquel nul ne pourrait se conformer. Elle se rappellerait toujours de cette enfance perdue, de cette adolescence gâchée, de ses premières années d'adulte égarées dans les méandres brumeuses de ses traitements bien trop lourds. La vie de Meryl resterait à jamais marquée par tout ce qu'elle avait pu manquer...
Mais aujourd'hui, il était temps de tout rattraper, petit à petit. Son coeur rata un battement lorsque Caleb lui souffla comme si de rien n'était qu'il l'invitait. Elle, Meryl Hammond. Invitée à manger avec quelqu'un, dans un lieu public, là où tout le monde pourrait les voir, là où des regards emplis de jugement risquaient de se poser sur eux au moindre faux pas.
Jamais ses parents n'auraient pris ce risque. Mais Caleb... Caleb l'acceptait. Caleb l'invitait. Sentant les larmes monter, elle avait rapidement changé de sujet, pour éviter de l'inquiéter. Et Meryl apprit que son ami sortait souvent, avec ses parents. Qu'il se rendait à Manhattan avec eux. Qu'elle pourrait peut-être venir avec lui, un de ces jours. Une proposition à laquelle elle avait répondu d'un hochement de tête, bien incapable de dire quoi que ce soit. Elle n'était pas certaine que Caleb se doutait de l'impact qu'il avait sur elle, par cette simple offre...
Il lui parlait de choses qu'elle n'avait jamais connu, jamais expérimenté par elle-même. Sortir après les cours. Prendre un milkshake. Draguer. Jouer avec des "potes". Une vie ordinaire. Un quotidien banal pour un adolescent qui ne l'était pas. Meryl ne savait pas si elle l'enviait d'avoir connu tout cela ou si elle compatissait de savoir que tout ça lui avait été arraché. Peut-être un peu des deux.
Meryl lui fait part de son propre quotidien. Du monde qu'elle n'a expérimenté qu'au travers de livres ou d'un écran. De ce monde dans lequel elle ne trouve pas sa place, tout comme Caleb. Et enfin, elle clame qu'ils n'ont pas à attendre qu'on leur fasse une place. Qu'ils enfonceront la porte qui leur était fermée, envers et contre tous. Caleb sourit. Serre ses doigts tendrement.
Ils arrivèrent enfin à destination, dans ce parc au sein duquel ils pouvaient se promener et s'installer sans crainte. Meryl demeurait silencieuse, suivant le jeune homme, l'écoutant attentivement. Un peu fatiguée, elle ne voulait toutefois pas que les choses prennent fin aussi tôt, alors qu'ils venaient à peine d'arriver. Malgré son mutisme temporaire, un rire fit son chemin entre ses lèvres lorsque Caleb lui fit part de sa mésaventure avec un cygne. Oh, elle pouvait aisément l'imaginer, ce petit garçon courant après le blanc oiseau sans se rendre compte du danger...
Meryl s'assit en tailleur aux côtés de Caleb, alors que celui-ci parlait joyeusement. Le visage de la jeune femme s'anima lorsque son ami sortit les biscuits qu'il avait emmenés, ses doigts s'agitant joyeusement dans un mouvement qu'elle avait appris à libérer. Un geste que ses parents auraient restreint, puni, mais qu'elle exprimait d'une façon presque provocante, une manière pour elle de dire qu'ils ne la contrôlaient plus. Qu'elle ce qu'elle était, différente, de bien des manières...
Enfin, Meryl retrouva la parole, lorsque Caleb lui tendit une bouteille étrange. Elle en avait goûté le contenu sans hésitation, accordant une confiance totale au jeune homme. Le goût et la texture l'avaient saisi comme une caresse, lui tirant un "Tellement bon !" spontané, enthousiaste. Elle avait tendu ensuite la bouteille à Caleb, un sourire aux lèvres, sans réaliser que sa bouche était légèrement barbouillée de yaourt :
"Merci. C'est... C'est délicieux."
Meryl se laissa tomber sur le dos, ses jambes toujours croisées dans un tailleur. Elle avait tendance à adopter des postures improbables, en particulier lorsqu'elle se sentait apaisée ou heureuse. Et actuellement, elle était aussi bien l'un que l'autre. Son regard s'égara dans le ciel, si bleu, si doux, alors qu'un doux soupir faisait son chemin hors de sa gorge.
Elle détacha ses cheveux, qu'elle avait noués dans une rapide queue de cheval, les laissant tomber en cascade sur le sol herbeux. Libre. Entièrement, complètement libre. Un rire lui échappa, alors qu'elle avouait :
"Je pourrais rester ainsi des heures..."
Mais son sourire eut vite fait de se disparaître. Elle se redressa, quittant sa position en tailleur pour se recroqueviller, calant ses genoux contre sa poitrine :
"Mais tu t'ennuierais probablement... Ce n'est pas intéressant."
Ses doigts s'égarèrent dans sa chevelure, s'entortillant autour de ses mèches. Meryl faisait tout ce qu'elle pouvait pour s'affranchir de son passé, des contraintes qui y étaient liées, mais il était toujours là, prêt à pointer le bout de son nez. A lui murmurer d'une voix pernicieuse que rien de ce qu'elle disait ou faisait n'intéressait autrui. Qu'elle devait faire des efforts. Qu'elle n'était pas assez. Qu'elle ne serait jamais assez.
"Je suis désolée."
Désolée de perdre ainsi son sourire. Désolée de gâcher ainsi leur sortie. Désolée d'être ce qu'elle était. Désolée de ne pas être à la hauteur de son ami. Dissimulant son visage dans le creux formé par ses genoux, Meryl laissa échapper un "Hmm..." indistinct, contrarié, un son inarticulé qui parvenait à exprimer la négativité de ce qu'elle ressentait d'une manière que les mots ne pouvaient pas retranscrire.
Les bruits se faisaient plus présents. Les lumières plus vives. Il fallait qu'elle se calme. Qu'elle s'apaise. Aussi vite que possible.
(c) sweet.lips
▲
❝ Caleb Turner ❞
Niveau de pouvoir : 4 Niveau de maîtrise : 1 Messages : 466 Date d'inscription : 27/01/2019 Humeur : Fatigué
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Sam 6 Avr - 22:54
Il y a quelque chose en Meryl d'enfantin, de presque naïf, une enfant crucifiée par la vie et qui pourtant persiste, pointant timidement le bout de son nez de derrière les barrières que la jeune femme place entre elle et la vie. C'est beau, presque inspirant. Caleb a l'impression de parler à quelqu'un d'à la fois infiniment plus vieux et infiniment plus jeune que lui.
Il joue avec la bouteille de Yop !, trempe à son tour les lèvres dedans tandis qu'un court rire l'agite, puis la pose de nouveau. L'instant est paisible. Les rayons du matin caressent leurs peaux exposées. Un vent tendre frôle leurs corps. La bouche de sa compagne est barbouillée d'un liséré blanc de lait. La vision est attendrissante malgré lui, et la position qu'elle entreprend le fait rire.
« De rien. J'aime faire partager mes découvertes. C'est mon côté aventurier ! »
L'hilarité l'emporte de nouveau. Il passe ses doigts dans sa chevelure rebelle, balance lui aussi sa tête en arrière pour mieux l'offrir au soleil. Ses yeux se ferment. Il ne voit pas à ses côtés Meryl libérer ses cheveux en même temps que son âme. Son être entier est tourné à l'introspection, à l'assimilation. Il pense à son échange, quelques temps auparavant, avec sa compagne, aux mots qu'elle a prononcé. À son passé. À ce qu'elle a vécu. À ce que cela fait, d'exister dans un tel contexte, dans une telle famille. Comme souvent, il se demande ce qu'il se serait passé si ses pouvoirs s'étaient révélés plus tôt, plus jeune, s'il avait dû enfant grandir auprès de ses parents.
Ses songes sont interrompus par les dires de la jeune femme, si spontanés, si apaisés. Il laisse un sourire courber ses lèvres. Rester ici des heures... Oui, c'est bien aussi. Tout ce qu'elle voudra. L'important, c'est qu'elle ressorte heureuse de cette sortie.
Mais l'étincelle d'espoir se douche d'elle-même, s'écrase et s'étouffe dans un retour d'oxygène qui fait peur à entendre, peur à voir. Caleb ouvre instantanément les yeux. Le spectacle lui fait mal. Recroquevillée soudain, Meryl s'excuse, Meryl s'écorche, Meryl s'épuise. Il sent la panique monter en elle, angoisse à son tour. Est-il capable d'arrêter les engrenages de la terruer ? Est-il en mesure de faire cesser la douleur ? Est-il assez fort pour soulever ce poids là.
« Meryl... Meryl, Meryl, c'est pas grave... »
Il se redresse, il se penche vers elle, il la regarde. Elle. Il secoue la tête, doucement, parce qu'il ne sait quoi faire d'autre, parce qu'il ne trouve pas les mots pour exprimer ce qu'il voudrait pourtant lui communiquer.
« Meryl on s'en fout ok ? Tu peux rire, pleurer, chanter, voler, j'en sais rien, je m'en fous. Je m'en fous. T'es libre. »
Les mots se libèrent. Les digues se brisent. Ses propres sentiments se révèlent. Ses yeux brillent un peu trop fort soudain. C'est que son propre discours résonne en lui, c'est que dire ces mots-là signifie parler pour lui aussi.
« Je suis pas... T'es plus avec tes parents ok ? Personne te jugera, et personne n'a le droit de te juger. T'as le droit de vouloir des choses. T'as le droit d'en ressentir aussi. T'as le droit d'exister aussi, Meryl... Surtout en fait... »
Le garçon secoue de nouveau la tête, ne sait plus que dire, pose finalement ses mains sur les genoux de son amie. Son regard la cherche. Il la scrute. Il ne sait pas ce que ses mots signifient, ce qu'il veut dire, ce qu'il essaie d'évoquer.
« Tu m'as dit... Tu m'as dit tout à l'heure qu'on allait défoncer les portes de ce monde pas vrai ? Alors... Alors go. Fais ça. Assume-toi. Au moins avec moi. »
Il sourit finalement. Son discours est laborieux, parsemé d'inspirations qui se sont égarées au fil de ses propos, d'hésitations qui se sont imiscées dans le fil trop fin de sa conversation, pourtant il lui semble avoir enfin trouvé ce par quoi il souhaite terminer. Ce qui paraît le plus important, le plus primordial.
« Je t'aime. »
Ce n'est pas un mot d'amour, pas au sens passionnel du terme. Il y a simplement quelque chose de spécial, avec Meryl, quelque chose de singulier qui n'appartient qu'à elle, qu'à eux, une relation qui évoque celle d'un frère et d'une sœur. Et peu importe les étiquettes au final, peu importe le mot. Il l'aime.
▲
❝ Meryl Hammond ❞
Niveau de pouvoir : Niveau 3 Niveau de maîtrise : Niveau 1 Messages : 45 Date d'inscription : 28/02/2019
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Dim 7 Avr - 23:46
Special
❝ Pv Caleb ❞
Meryl avait clairement progressé sur le chemin de l'acceptance, mais tout n'était pas encore gagné. Il y avait le doute qui menaçait de poindre en chaque instant, la peur, l'anxiété, la honte. Tous ces sentiments qui lui avaient été imposés pendant des années et continuaient à tenter de l'assaillir, en particulier lorsqu'elle s'y attendait le moins. Elle était en train de passer un moment si agréable avec Caleb. Leur première sortie tous les deux, entre amis, dans ce monde extérieur qu'elle connaissait à peine.
Et elle était en train de tout gâcher. De se laisser dévorer par une angoisse soudaine, irrationnelle, surgie d'elle ne savait où. Son coeur était embarqué dans des montagnes russes et elle en subissait les montées et les descentes, victime du passé, prisonnière de ses traumatismes. Elle frémissait, incapable de trouver ses mots, de regagner son calme. A quelques mètres d'eux, l'ampoule d'un lampadaire explosa, se répandant en copeaux de verre. Pas de victimes, cette fois, heureusement.
Meryl gémit. Les paroles de Caleb parvinrent à ses oreilles, trouvèrent lentement leur sens. Elle releva difficilement la tête, le regard hanté, perdu dans la peur, les souvenirs, le doute, la gêne. Le jeune homme posa sa main sur ses genoux et Meryl eut un bref sursaut. Mais elle accepta le contact de la main gantée, douce. Elle savait qu'il se retirerait si elle le demandait. Qu'il ne s'imposerait pas à elle.
Elle savait aussi qu'il faisait de son mieux. Qu'il n'était qu'un adolescent, aussi égaré qu'elle devant la détresse qu'ils partageaient, le poids du passé, les conséquences de leur différence... Elle ne voulait pas être un sujet de plus pour lequel il lui faudrait s'angoisser. Ce n'était pas son rôle. Elle était l'aînée, celle qui avait vécu plus d'années sur cette fichue planète. Et pourtant... Pourtant, elle ne se sentait pas plus légitime dans ce rôle. Elle ignorait tant de choses. Etait emplie de doutes. Comment pouvait-elle l'aider ? Le guider ? Le rassurer ?
Plus que tout le reste, ce furent ses derniers mots qui parvinrent à ramener Meryl à la réalité, à l'éloigner de ses pensées emplies de crainte. Je t'aime. Des mots simples. Des mots doux. Des mots qu'elle n'avait que rarement entendu, encore moins dirigés à son égard. Elle ne se rappelait pas d'un "Je t'aime" soufflé par son père, par sa mère. Par qui que ce soit en ce monde. Non. Il n'y avait que Caleb. Le premier à prononcer ces mots pour elle. Le premier à lui dire "Je t'aime.".
Maladroitement, la jeune femme se redressa, quittant sa position recroquevillée pour s'agenouiller. Puis elle tendit ses bras vers son ami et l'agrippa de ses doigts tremblants, un peu trop fort, un peu trop brusquement. Elle n'avait pas l'habitude. Etait trop fatiguée pour contrôler correctement son corps, la force qu'elle déployait. Elle se réfugia contre le jeune homme, les joues trempées de larmes, sa respiration se faisant progressivement de plus en plus calme.
Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime. Les mots tournaient et retournaient dans sa tête. Elle avait du mal à réaliser qu'elle les avait bien entendus, qu'ils lui étaient réellement adressés, à elle, Meryl Hammond. Qu'elle les méritait. Qu'elle y avait droit. Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime. Les mots se répétaient et l'apaisaient. Enfin, elle cessa de frémir. De pleurer. Elle se détacha de Caleb, l'expression un peu égarée et perplexe de l'après-crise ayant pris place sur son visage.
Maladroitement, elle chercha son tangle, le tortillant entre ses doigts. Trouver les mots était compliqué. Réussir à les faire sortir était encore plus difficile. Meryl dut s'y reprendre à plusieurs fois, ses lèvres ne laissant échapper que silence ou sons inarticulés jusqu'à finalement réussir à prononcer :
"... t'aime... aussi."
Aussi simplement que ça. Aussi sincèrement que ça. Oui, elle aimait Caleb. D'un amour qui n'était pas définissable par les codes, par les labels. Elle l'aimait. Comme il l'aimait, lui. Continuant à jouer avec son tangle d'une main, elle chercha timidement celle de Caleb du bout de ses doigts, paume nue contre paume gantée. Elle n'avait pas la force de soutenir son regard, de parler. Mais elle pouvait le toucher.
(c) sweet.lips
▲
❝ Caleb Turner ❞
Niveau de pouvoir : 4 Niveau de maîtrise : 1 Messages : 466 Date d'inscription : 27/01/2019 Humeur : Fatigué
Sujet: Re: Special. | ft. Meryl Mar 23 Avr - 14:53
Je t'aime.
Trois mots. Un choc. Les traits de Meryl se crispent et se dévoilent, son expression changeante. Il se passe quelque chose. Le phénomène naît et serpente, circule sous la peau comme une décharge. L'onde se propage. L'instant se tire et s'étend, et il attend, guettant les signes de ce qu'il a pu provoquer.
Je t'aime.
Elle ne sait pas réagir. Elle ne sait pas entendre. C'est dramatique, songe-t-il, de ne pas comprendre. C'est horrible, pense-t-il, de n'avoir jamais connu cela, ces quelques mots si simples et si vrais, ces quelques modestes mots qui en disent tellement plus que leurs syllabes éparses ne veulent bien le montrer.
Je t'aime.
Elle tend les bras, fébrile, et Caleb prend contre ses doigts gantés les mains désespérée, serre contre lui ce corps tremblant d'une émotion qu'il peine à comprendre. C'est difficile, la panique. Il a déjà oublié ce qui a bien pu déclencher tout ça. Il peine à analyser ce qui secoue encore la jeune femme qui se blottit contre lui. C'est terrifiant, la panique, comme une explosion au cœur du silence. Soudaine, violente, fugitive. Le garçon a l'impression d'être perdu dans un labyrinthe dont il possède une carte trouée. Une seule chose est sûre : ses mots ont fonctionné. Peut-être trop, et pas assez pourtant. Meryl a tant réagi que ça lui fait mal, mais sera-t-elle un jour capable de les entendre réellement ? Il n'en est pas certain.
Moi aussi, répond-elle pourtant, de cette voix erraillée de fatigue, de ce ton rendu presque muet de détresse. Et c'est tout ce qui importe, au fond. Ils ne sont pas seuls. Elle ne l'est pas. Et si vient le jour où Caleb lui-même se trouve en besoin d'un soutien, en quête d'une amie, il sait vers qui se tourner. La solitude apparente de sa nature s'est muée au fil des quelques semaines passées à l'Institut en une étonnante capacité à nouer des liens. Il espère que sa compagne ressent la même chose.
Ses bras se referment tendrement sur la silhouette recroquevillée contre lui tandis que ses yeux émus partent à la rencontre du ciel matinal. Bleu contre bleu, il se prend à sourire. C'est une expression douce, étonnament apaisée après les événements récents, pourtant il n'y peut rien. La panique de Meryl a été aussi tragique que le moment présent est beau. Ce n'est pas une grande beauté, ce n'est pas de ces instants qui par leur essence même émerveillent, pourtant il y découvre un merveilleux insoupçonné. Peut-être que c'est ça, grandir. Peut-être que c'est apprendre à apprécier les petites choses, à regarder les détails et à en faire des montagnes, parce que le bonheur ce n'est pas forcément ce rêve grandiose auquel on aspire, parce que parfois la brise du petit matin dans les arbres illuminés de soleil, c'est suffisant. C'est assez.
« Meryl... »
Il sourit doucement, la laisse jouer avec son tangle, lui donne le temps de se détendre. Son regard continue d'arpenter les alentours, son cœur de s'emplir d'une paix rafraîchissante.
« On est bien, là, non ? »
Un petit rire. Ses doigts libérés frôlent la surface de la pelouse, dont il voit les brins caresser le cuir de ses gants. La tentation de laisser sa peau s'imprégner du soleil est presque violente. Ses yeux cherchent ceux de Meryl – changer d'idée, ne pas céder.
« Je te promets qu'on va passer une bonne journée. D'accord ? Peu importe où. Peu importe comment. C'est promis. »